Présentation
Bonjour Lilian. Pour te présenter brièvement, on peut dire que tu es co-fondateur et co-gérant de Solis Culturae. Ainsi tu es cultivateur de Spiruline depuis 2012, après avoir fait des études d’acquaculture.
23 novembre 2020
Nous avons interrogé notre chef de culture sur sa mission, l'éthique, les labels et le prix de la spiruline
Bonjour Lilian. Pour te présenter brièvement, on peut dire que tu es co-fondateur et co-gérant de Solis Culturae. Ainsi tu es cultivateur de Spiruline depuis 2012, après avoir fait des études d’acquaculture.
Mon meilleur ami Julien, l'autre co-fondateur de Solis, m’avait proposé alors d’arrêter mes études pour nous lancer dans la pisciculture, on envisageait les truites (rire). J’avais entendu parlé de la spiruline pendant mes cours, d'ailleurs à ce moment là, on m'avait déconseillé cette culture. Pour l’anecdote, cette même enseignante faisait quelques années plus tard un rapport sur les engrais azotés pour … la Fédération Française de Spiruline.
Nous faisons de l’alguoculture, qui est la branche de l’agriculture consacrée à la production de macro et micro algue (dont les cyanobactéries). Par rapport l’agriculture classique, pour laquelle tout le monde a des notions, ici le support c’est l’eau plutôt que la terre. En effet, c’est le milieu dans lequel les organismes cultivés vivent. Une des particularités, c’est que la culture de spiruline est très réactive : il y a des changements à l’échelle de la demi-journée en plein été.
Au départ c’est un choix d’indépendance, sans vision globale. Une de nos motivations premières était de « travailler local » : travailler chez nous, avec peu de moyens, être entrepreneur étaient notre Eldorado. Au fur et à mesure de l’aventure, les aspects éthiques sont entrés en jeu, on a observé que cette culture est très écologique : peu d’eau, peu d’énergie, peu d’intrants, avec un bilan carbone à priori positif. Enfin n’omettons pas l’aspect social, ça créé de l’emploi, on travaille entre amis et en famille.
Ces labels valident bien entendu, notre démarche écologique. Le label privé Ecocert récemment obtenu est peut-être plus « bio logique » que le label européen AB que nous visons, mais dans l'inconscient collectif ce label est prépondérant.
La spiruline demande une grande attention, et dès qu’on la produit de manière industrielle, elle perd une partie importantes de ses qualités nutritionnelles, notamment lors la phase de séchage.
Autre point qui change tout, c’est un produit déshydraté ! Par exemple, il faut 20kg de tomate fraîche pour faire un kilo de tomates séchées.
Enfin, cultiver en France engendre un coût social fort. Mais je crois que l’enjeu économique de consommer français, est de plus en plus clair auprès de nos concitoyens : c’est une forme de redistribution des richesses qui est vitale pour la France.
Pour conclure, mettre de la spiruline dans son alimentation quotidienne, vous reviendra au même prix qu’une pomme par jour, mais l’apport nutritionnel sera majeur, même si les pommes c’est super.
C’est un peu l’inverse, plus les bassins sont qualitatifs, plus le filtrage est efficient et plus le goût devient léger. En observant les bassins, on sait déjà si la spiruline séchée sera de qualité. Cette qualité sera ensuite vérifiée par analyse nutritionnelle.
En France, tous les producteurs utilisent normalement une source d’eau de qualité sanitaire suffisante (ça correspond à une réglementation précise). Nous utilisons de l’eau potable pour nous faciliter la tâche. Ensuite, nous observons l’interaction entre le bassin et les intrants avec des analyses régulières en minéraux.
Il n’est pas possible aujourd’hui de faire de la spiruline AB en France, on l’espère pour 2021. C’est qu’en même fou que les spirulines AB EU soient cultivées en Chine ou en Inde, dans l’indifférence des revendeurs. Premièrement, le transport de l’autre bout du monde a une empreinte écologique, de plus l’eau dans ses pays là n’est peut-être pas aussi surveillée qu’en France, sans évoquer l’aspect social.
Un autre enjeu possible c’est de trouver une source d’énergie verte, fabriquer nos propres engrais en revalorisant les déchets organiques. L’idée c’est d’être vert sur toute la chaîne.
A l’échelle des consommateurs, l’avenir est sans doute dans la spiruline fraîche, j’espère en proposer d’ici deux ans, car c’est la meilleure façon de la consommer en tant qu’aliment. Les études de marchés estiment que les ventes en France seront multipliés par dix en 5 ans, on espère que c’est la filière française et européenne qui seront les grandes gagnantes.